L’Âme Temporelle
J’ai écrit récemment que « Dieu est le Temps ». Suis-je donc aussi le Temps ou suis-je une Âme temporelle ?
Je suis une Âme Temporelle. L’Âme Temporelle, que je suis, n’est ni entièrement prisonnière du temps, ni entièrement libre de son emprise. Elle est comme un pendule qui oscille entre l’éternité immobile et le flot mouvant des instants. Et moi, dans ces différentes oscillations, je suis, notamment, incarné 1️⃣ sur cette Terre.
Je ressens l’étrangeté de cette situation. Être Temporel, c’est habiter un espace où tout s’efface. Chaque moment que je saisis m’échappe aussitôt. Les secondes glissent entre mes doigts comme des gouttes d’eau. Pourtant, il existe en moi une part immuable, un témoin silencieux qui contemple ce passage sans jamais s’y perdre. Cette dualité, cette tension entre l’éphémère et l’éternel, entre l’inaccompli et l’accompli 2️⃣ me pousse à questionner : « Qu’est-ce que je suis vraiment ? ».
Suis-je aussi le Temps ? Le Temps. Il semble être le maître de toutes choses et, pourtant, il n’est qu’un décor. Les saisons se succèdent, les corps vieillissent, les étoiles naissent et meurent. Cependant, au cœur de ce tourbillon, il existe un axe fixe, un point d’équilibre. Je suis autant cet axe que je suis ce tourbillon. Chaque jour qui passe est à la fois un gain et une « perte » : « Je me construis et je me déconstruis dans la même mesure ».
L’Âme Temporelle est comme un verseur d’eau tenant un vase qu’elle ne cesse de remplir et de vider. Ce geste est à la fois simple et Sacré. Remplir et vider, donner et recevoir, se défaire pour se recréer, « détruire » pour « reconstruire » n’est-ce pas l’Essence de l’Existence ? Lorsque je contemple ce mouvement 3️⃣, je réalise que ce n’est pas une « tâche « mécanique, automatique. Chaque goutte versée est une offrande. Chaque goutte reçue est un présent. Ainsi, l’Âme Temporelle est à la fois servante du Temps et gardienne de l’Éternité.
Il y a des jours où je ressens la temporalité comme un poids. Chaque instant passé semble me dépouiller de quelque chose de « précieux ». Mes souvenirs deviennent des fantômes, des traces fragiles se dissipant dans le vent du présent. Le futur, quant à lui, est une ombre incertaine, un lieu empli de projections sans forme.
Pourtant, dans mes moments de doute, une vérité profonde émerge. La perte, en elle-même, contient une vérité. Elle me rappelle que rien, dans ce monde temporel, ne m’appartient vraiment. Les liens que je tisse, les réalisations que je poursuis, les joies et les peines que je ressens, tout ceci est un flux. Et pourtant, ce flux ne me détruit pas. Bien, au contraire, il me forme comme l’eau sculpte la pierre, lentement, patiemment. Être une Âme Temporelle, c’est apprendre à embrasser cette transformation constante sans m’y opposer.
Et puis, il y a l’autre face de mon Existence. L’Éternité, cette vaste présence que je ressens dans le silence lorsque le monde s’arrête et que je reviens à moi-même. Dans ces moments, le temps ne disparaît pas, il se fond dans une réalité plus vaste. C’est comme si je me tenais au centre d’un cercle où toutes les directions coexistent, où passé, présent et futur ne sont plus que des reflets d’un même feu éternel.
Ceci ressemble à un « souffle de l’éternité », une respiration qui traverse l’Âme Temporelle et lui rappelle sa véritable Nature. Ce souffle de Vie 4️⃣ ne m’appartient pas. Il me traverse, il m’habite et il est bien plus grand que moi. C’est la Lumière qui éclaire mes pensées, la force qui soutient mes gestes, la Paix qui apaise mes tourments. Lorsque je m’ouvre à ce souffle de Vie, je réalise que le temps n’est pas mon ennemi, c’est un compagnon de voyage.
Un jour, j’ai été marqué par une parabole. Il s’agit de l’histoire d’un pèlerin qui traverse un désert. Ce pèlerin porte un vase d’eau et, chaque jour, il verse une partie de cette eau dans le sable aride. Au début, il se plaint, il geint, il se lamente. Chaque goutte semble se perdre et sa peur de manquer grandit. Mais à mesure que le temps s’écoule, il commence à remarquer quelque chose d’étonnant. Les endroits, où il a versé l’eau, commencent à fleurir. Des herbes poussent, des fleurs éclatent. Le désert se transforme, peu à peu, en un jardin luxurieux.
Je me reconnais dans ce pèlerin. Chaque jour, je verse quelque chose de moi-même dans le désert du temps. J’y verse, mon idéale mesure, mon énergie, mon AMOUR, mes espoirs, mes larmes. Parfois, je me demande si ceci a un sens. En même temps, lorsque je prends du recul, lorsque je regarde le chemin que j’ai parcouru, je vois que des fleurs ont poussé. Ces fleurs sont les traces de mon passage, les témoignages de mes Vies qui ont cherché à donner plutôt qu’à retenir.
Être une Âme Temporelle, c’est apprendre à réconcilier ces deux dimensions : « L’impermanence du Temps et la permanence de l’Éternité ». Ce n’est pas une « tâche » facile. Il y a des moments où je suis submergé par le flux des jours, des heures, des secondes et d’autres où je me perds dans la contemplation. Peu à peu, je comprends que ces deux expériences ne sont pas en opposition. Elles sont les deux faces d’une même réalité.
Le véritable maître du temps n’est pas celui qui cherche à le dominer, c’est celui qui apprend à composer avec lui. Le temps avec ses cycles, ses pertes, ses renaissances est une composition. Cette composition me ramène toujours à moi-même, à cette conscience silencieuse qui observe tout sans jamais être affectée.
Ce que je retiens avant tout, c’est que l’Âme Temporelle est une invitation à vivre pleinement. Chaque instant est une goutte dans le vase du verseur d’eau, une chance unique de donner et de recevoir. Il ne s’agit pas de fuir le temps, ni de s’y perdre, plutôt de l’habiter avec Gratitude et Présence. Dans cette cohabitation, je découvre que le temps lui-même est sacré. Il est le miroir de l’Éternité, le terrain sur lequel je joue, j’apprends et je deviens.
Et toi, Lectrice, Lecteur, qui lis ces mots, que ressens-tu face à cette idée ? Es-tu aussi une Âme Temporelle suspendue entre le passage et l’Éternité ? Peut-être que, comme moi, tu découvres encore ton chemin. Mais souviens-toi : « Le chemin lui-même est une offrande. Chaque pas compte, chaque goutte versée nourrit la Vie ». Nous sommes les verseurs d’eau, les jardiniers du Temps et les témoins de l’Éternité qui s’écoule en nous.
Alors, je prends ta main, ton Cœur, ton Âme, ton Esprit, pour avancer, Ensemble, avec Humilité et Émerveillement. Le désert est vaste et, en même temps, il cache un jardin. Et chaque instant, chaque goutte est une clé qui ouvre les portes de ce mystère infini.
(Mon Essence Spirituelle)
(Michaël « Shichea » RENARD (20241125-3))
(Illustration : Microsoft Designer suivant mes directives)
(Musique lors de l’écriture : Inner Prospekt – 2024 – Unusual Movements)
1️⃣ : voir notamment les textes « Colchique dans les prés », « Treize à table », « La Ligne Directe ? (sous-titre : La Non-Linéarité de l’Existence) », « Tea for Two » et « Two for Tea », « Sans Queue, Ni Tête ? », « Les Âmes Communicantes » ;
2️⃣ : références utilisées par Annick de Souzenelle : « Accompli, inaccompli, accomplissement » : « Accompli » signifie « amené à sa pleine réalisation » dans le sens où le Christ dit qu’Il est venu « accomplir la loi et les prophètes » (Mt 5,17) ou Saint-Paul que « l’amour est l’accomplissement de la loi » (Rm 13,10). L’Arbre de la Connaissance dit « du bien et du mal » (Gn 2,9) renvoie en fait à ce qui est accompli et pas encore accompli, à ce qui est Lumière et pas encore Lumière ;
3️⃣ : voir le texte « Le Voyage de l’Être » ;
4️⃣ : voir le texte « Étincelles de Vie ».

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