Pouvoirs

Récemment, j’ai vu une vidéo d’une philosophe qui parlait du pouvoir grotesque (https://www.youtube.com/watch?v=i-DfV-TjWKM). Dans la vidéo, il y avait des exemples de personnages politiques « utilisant » ce pouvoir grotesque.

Avant d’aller plus loin dans l’écriture de ce texte, je me suis remis à regarder à l’étymologie de ce mot sur plusieurs sites (wikipedia, etymonline, cnrtl).

« Grotesque » vient de l’italien « Grottesco », lui-même issu de « Grotta », signifiant « Grotte » ou « Cavité souterraine ». À la fin du XVe siècle, à Rome, ont été découvertes, « par hasard », des salles souterraines appartenant à la Domus Aurea (« Maison Dorée ») de l’empereur Néron. Les découvreurs ont cru que c’étaient des grottes.

Les murs de ces espaces étaient décorés de peintures très particulières comme des formes hybrides, figures mi-humaines mi-animales, corps mêlés à des plantes, proportions volontairement déformées, absence de logique réaliste. Ces décors furent appelés « Grottesche », c’est-à-dire « Peintures trouvées dans les grottes ».

Le grotesque est, donc, ce qui émerge des profondeurs, des grottes. Il renvoie à ce qui est caché, ce qui n’est pas intégré harmonieusement, ce qui surgit sans avoir été conscientisé ni unifié.

Je peux même aller plus loin en écrivant que le grotesque peut être vu comme une forme née d’un déséquilibre entre l’apparence et l’essence, entre le masque et la vérité, entre l’ego démesuré et l’être non reconnu.

Je me suis posé la question s’il y avait un pouvoir qui pourrait « contrebalancer » ce pouvoir grotesque. Que pourrais-je « opposer » au mot « grotesque » ? Digne ? Sobre ? Juste ? Retenu ? Tous ces mots ne me « convenaient » pas. Et puis, comme j’apprécie le silence, de parler du silence, d’écrire sur le silence, c’est « Pouvoir Silencieux » qui est venu.

D’un côté, le pouvoir grotesque, bruyant, très expansif voire déstabilisant. Un pouvoir qui crée de la tension. Un pouvoir qui naît dans le mental.

De l’autre, le pouvoir silencieux, calme, presque invisible et pourtant infiniment stable. Un pouvoir qui crée de l’attention. Un pouvoir qui émane de l’Être.

Le pouvoir grotesque se reconnaît à son agitation. Il parle fort parce qu’il n’entend rien. Il gesticule parce qu’il ne tient pas debout intérieurement. Il cherche à convaincre, à imposer, à marquer, à laisser une trace visible comme si son existence devait, sans cesse, prouver qu’elle existe.

Ce pouvoir-là ne repose pas sur une présence. Il repose sur une peur. Peur de disparaître. Peur de ne pas/plus être reconnu. Peur de ne pas compter.

Alors l’ego s’enfle. Ce cher ego qui se fait costume, posture, discours. Il se maquille de certitudes, d’opinions tranchées, d’indignations spectaculaires. Il confond intensité et vérité, volume et profondeur, domination et autorité.

Le pouvoir grotesque est une augmentation de volume comme trop de mots, trop d’images, trop d’émotions projetées. Il déborde parce qu’il est creux. Il envahit parce qu’il est vide.

Et pourtant, il agit. Nous le constatons toutes et tous depuis quelques années. Il influence, il contraint, il impressionne. Non pas parce qu’il est juste, uniquement parce qu’il occupe l’espace. Non pas parce qu’il éclaire, uniquement qu’il aveugle.

Le mental adore ce pouvoir. Il s’y reconnaît. Car le mental veut maîtriser, contrôler, classer, hiérarchiser. Il veut être au sommet, même d’un sommet artificiel. Il préfère régner sur le faux que s’abandonner au vrai. Et cette frontière floue du « vrai » et du « faux » est une arme de déstabilisation utilisée par certaines dictatures. C’est un peu la fabrique du mensonge.

Pourtant ce pouvoir est instable. Il doit être entretenu sans cesse comme l’eau qui bout. Il a besoin d’ennemis, de scandales, de conflits. S’il n’y a plus de bruit autour de lui, il s’effondre.

Par contre, le pouvoir silencieux est un pouvoir que l’on remarque à peine. Un pouvoir qui ne cherche rien, ne démontre rien, ne revendique rien. Il ne vient pas du mental. Il vient de la Présence. Il ne naît pas de l’ego. Il naît de l’alignement. Il n’a pas besoin de convaincre car il rayonne.

Les êtres qui portent ce pouvoir n’élèvent pas la voix. Ils n’occupent pas le centre. Ils n’imposent pas leur vision. Ils sont simplement là pleinement, totalement, intégralement présents.

Leur force ne se mesure pas à ce qu’ils prennent, simplement à ce qu’ils laissent intact. Ils ne transforment pas par pression, simplement par résonance. Leur autorité n’est pas hiérarchique. Elle vient du fait qu’ils sont enracinés dans quelque chose de plus vaste qu’eux-mêmes. Ces Êtres n’ont pas besoin de reconnaissance. Ils n’ont pas besoin de victoire. Ils n’ont pas besoin d’avoir raison.

Ils ont traversé l’ego. L’ego ne se combat pas. Tout combat le renforce. Il se nourrit de résistance, de tension, d’opposition. Lui faire la guerre, c’est encore lui accorder le centre.

Traverser l’ego, c’est le regarder sans s’y accrocher. C’est reconnaître sa fonction sans lui confier le gouvernail. C’est voir clairement qu’il est, certes, une structure nécessaire et, en même temps, il est « secondaire ». L’ego est né pour organiser l’expérience, non pour définir l’Être. Il sait nommer, comparer, hiérarchiser, distinguer, protéger. Il construit une interface entre le monde et la conscience. À ce titre, il est précieux pour vivre notre incarnation. Cependant lorsqu’on le confond avec ce que l’on Est, il devient tyrannique.

Ainsi, ces Êtres dont je parle, ont cessé de dire intérieurement : « Je suis ceci. Je suis cela ». Ils ont commencé à dire sans mots : « Ceci me traverse. Cela me traverse ». Un peu comme certains maîtres spirituels qui disaient, lors de miracles, qu’ils ne faisaient rien. Simplement « Pose ton regard ici » sans autres « mots ».

Les Pensées, rôles, histoires, blessures, succès, échecs, tout continue d’exister. Cependant, rien n’est plus confondu avec l’identité, avec le personnage. Le pouvoir silencieux agit comme la gravité. On ne la voit pas et, pourtant, tout repose sur elle. Il agit comme la lumière à l’aube, elle ne force pas la nuit, elle la dissout.

Là où le pouvoir grotesque divise, le pouvoir silencieux relie.

Là où l’un cherche à dominer, l’autre cherche à servir. Non par soumission uniquement par intelligence du vivant.

Là où l’un s’exhibe, l’autre se retire juste assez pour que l’essentiel apparaisse.

Le spirituel ne cherche pas le pouvoir. Et c’est précisément pour cela qu’il en émane.

Car le véritable pouvoir n’est pas la capacité de contraindre. Le véritable pouvoir c’est la capacité de tenir un espace sans le violenter. De rester stable quand tout s’agite. De demeurer clair quand le monde se trouble.

Le monde actuel confond souvent ces deux forces. Il applaudit le bruit et ignore le silence. Il couronne l’excès et soupçonne la sobriété. Il donne des tribunes au grotesque et détourne le regard de l’essentiel.

Le silence n’a pas besoin d’être reconnu.

Il attend.

Il demeure.

Il traverse les époques sans laisser de cicatrices.

Et lorsque le vacarme s’épuise, lorsque le pouvoir grotesque se dissout dans sa propre outrance, c’est toujours le pouvoir silencieux qui reste debout. Non pas comme une victoire, plutôt comme une évidence.

Car ce pouvoir-là ne vient pas de l’humain qui veut être quelqu’un. Il vient de l’Être qui a accepté de ne plus se prendre pour le centre.

Et dans ce renoncement apparent, se révèle la plus grande des puissances : « Celle qui n’a plus rien à prouver ».

(Mon Essence Spirituelle)
(Michaël « Shichea » RENARD (20251218-1))
(Illustration : Image générée)
(Musique lors de l’écriture : Hadal Sherpa – 2025 – Memoria)

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