L’Élan de l’Âme et l’Illusion du « Bien »

Avant d’aller plus loin dans l’écriture, alors qu’il était déjà presque terminé, m’est venu cette pensée : « Qu’est-ce que j’apprécie ce mois de février me poussant à me mettre en questionnement ? Pour moi, c’est une période riche en expériences, en ressentis, en acceptation, je peux même dire, en accomplissement. Je sais que certain.e.s ne la vivent pas de la même façon, que moi, car ils/elles se sentent perturbés que ce soit physiquement, mentalement, émotionnellement et, même, spirituellement. Je ne juge pas, je constate. Chacun.e vit son expérience à la ‘hauteur’ de ce qu’il/elle a choisi, a accepté de vivre dans sa présente incarnation ». Je reprends, sous une autre façon, ce que Frère Charbel (canalisé le 4 février 2025 par Sylvain Didelot) a dit : « Il n’y a pas d’expériences au-delà de ce que vous avez accepté de vivre. Chaque ‘problème’ vient déjà avec sa ‘solution’ » 1️⃣.

Après cet avant-propos, j’ai lu, il y a quelques jours, la phrase suivante sur une page FB : « Nous ne grandissons pas lorsque les choses sont faciles, nous grandissons lorsque nous faisons face à des défis ». Elle aurait été dite, écrite par un anonyme. Pourquoi pas !

Quand je l’ai lu, je me suis rappelé, directement, cette citation de Sénèque : « Non quia difficilia sunt non audemus, sed quia non audemus difficilia sunt ». Cette citation est présente dans les « Lettres à Lucilius, XVII, 104, vers 63 – 64 ». Je ne vais pas vous mentir, cette citation me parle. Je l’ai déjà citée dans différents textes 2️⃣. Bien évidemment pas sous sa forme latine, je l’ai mise dans sa traduction française : « Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles ».

Surprise ! Surprise ! Cette citation m’a amenée vers une autre, une de Baruch Spinoza : « Quand nous nous efforçons à une chose, quand nous la voulons, ou aspirons à elle, ou la désirons, ce n’est jamais parce que nous jugeons qu’elle est bonne ; mais au contraire, si nous jugeons qu’une chose est bonne, c’est précisément parce que nous nous y efforçons, nous la voulons, ou aspirons à elle, ou la désirons ».

Cette citation est tirée de son livre « L’Éthique » 3️⃣ publié en 1677 après sa mort la même année. J’ai lu que la publication a été reportée pour éviter une certaine censure. Cependant, il a quand même été censuré à l’époque. Au sens propre, le terme « censure » désigne, à la fois, l’action de condamner un texte, une opinion, une idée et d’en interdire sa diffusion. Dans l’époque actuelle, dans certains pays, la « censure » est bien d’application. Qui plus est, elle aussi synonyme de condamnation. Condamnation qui peut mener jusqu’à la mort. Cette « censure » se trouve à différents niveaux.

En fait, je ne savais pas que j’allais aller sur ce domaine de la « censure » avant de revenir sur la citation de Baruch Spinoza. En fait, la « censure », merci le net, trouve son origine dans une institution de la République romaine, celle des censeurs. Deux magistrats étaient chargés tous les cinq ans d’évaluer (en latin « censere ») le nombre des citoyens, de les répartir en classes en fonction de leur richesse et d’exclure de ces listes les citoyens de « mauvaises mœurs ». Tout un programme !

Je sais qu’il y a des censures politiques dans certains régimes qui restreignent l’accès à l’information pour éviter la contestation. Faut-il que je les cite au « risque » d’être censuré ? Il y a des censures dans certaines entreprises concernant des opinions, des contenus pour éviter des controverses. Il y a des censures culturelles, sociales concernant certains contenus jugés offensants, inappropriés selon des « normes » établies. Il y a des censures dans l’éducation par le fait que certains états, certaines nations réécrivent l’histoire voire omettent des sujets controversés. Il y a des censures religieuses comme l’interdiction de certains écrits, certains discours, certains livres, certains romans qui sont contraires aux dogmes religieux. Il y a même des œuvres artistiques comme des films, des poésies, des peintures, des musiques qui sont jugées blasphématoires dans certains pays. Il y a aussi des images, des textes humoristiques qui sont censurés sur des groupes dans FB.

Ainsi, la question « bonus », si je peux m’exprimer ainsi, est : « Existe-t-il une censure spirituelle ? ». Ma réponse est : « Oui ! ». Bien que la censure spirituelle soit moins visible que les autres types de censure que j’ai cités, elle peut avoir un « impact » sur les personnes en empêchant la libre exploration de la conscience, du sacré, du Divin, de la relation du Divin. Ainsi, même certains Guides, certains Êtres de Lumière « censurent » certains propos à travers leur « canal ». Ce sont des éléments qui ne « doivent » pas être dit, en tout cas, pas dans le moment de canalisation. Ce sera, peut-être, dit plus tard ou jamais. Est-ce réellement ces Guides, ces Êtres de Lumière ou est-ce leur « canal » qui « censure » ?

Tout ceci pour en arriver à la citation précitée de Baruch Spinoza. Quand je dis que ceci est « bon » ou ceci est « mauvais », je sais que je « juge ». Dans ce « jugement », je ne fais rien d’autre que « censurer » ce qui ne me « convient » pas ou plutôt ce que j’estime de ce qui ne me convient pas. Les exemples de censures que j’ai cités ne font rien d’autre que d’être dans le « jugement ». « Ceci est bon pour toi suivant notre idéologie, tu peux y accéder », « Ceci est mauvais pour toi, tu ne peux y accéder. Et si tu le fais, tu seras puni ».

Ainsi en me penchant sur mon propre mouvement intérieur, une réflexion « s’impose » à moi : « Je ne poursuis pas une chose parce que je la juge bonne, c’est parce que je la poursuis qu’elle me semble bonne ». D’aucun.e.s pourraient me dire ce n’est qu’un simple jeu de l’esprit avec cette inversion.

J’ai longtemps cru que ma raison imposait mes choix, que mes décisions étaient guidées par une analyse préalable du « bien », du « mal ». Cependant si ce que je perçois comme « bon » n’est qu’une conséquence de mon élan plutôt qu’une cause, alors d’où vient ce mouvement premier qui me pousse vers certaines choses et m’éloigne d’autres ?

Je sais que je ressens, en moi, des désirs, des aspirations, des élans qui semblent surgir sans que je les aie « délibérément » choisis. Lorsque je veux quelque chose, ce n’est pas parce que j’ai réfléchi à sa valeur. En fait, c’est l’intensité même de mon vouloir qui me fait croire qu’elle est « bonne ». Et lorsque je rejette une idée, une possibilité, ce n’est pas par une évaluation objective, c’est par une aversion, un rejet dont l’origine m’échappe. Est-ce que ce que je poursuis devient « noble » à mes yeux et ce que je fuis devient « condamnable », rejetable ?.

Alors, si mon élan précède mon jugement, d’où vient-il ? Est-il un pur caprice du « hasard », une fantaisie d’un moi autonome, d’un ego qui me joue son tour de magie ? Ou est-ce l’expression d’un « ordre » plus vaste qui me traverse ?

J’ai souvent pensé que je choisissais librement mes désirs, mes expériences, que j’orientais mon existence en fonction d’un choix réfléchi. Cependant si mon aspiration secrète précède toute analyse, alors suis-je vraiment « maître » de moi-même ? Ou ne suis-je que le vecteur d’un mouvement plus profond, plus ancien que ma conscience elle-même ?

Quand j’observe le monde qui m’entoure, la nature, par exemple, si proche de moi, j’y vois un mouvement universel où chaque Être, chaque Âme vit, bouge, s’épanouit suivant sa propre loi interne. L’arbre ne juge pas que la lumière est bonne avant de tendre vers elle, c’est en la cherchant qu’il fait d’elle une nécessité. L’oiseau ne décide pas que le ciel est désiré, il s’y élance, en fait son royaume. Chaque Être est porté par un élan qui le précède et qui lui révèle, au fil de son mouvement, la cohérence de son existence. Pourquoi serais-je une exception ? Pourquoi devrais-je moi, seul, tout soumettre à un tribunal de la raison avant de me laisser porter par ce qui me pousse à agir ?

Si je me laisse guider par une intuition alors mon rapport, à moi-même, change radicalement. Au lieu de vouloir contraindre mes expériences à une norme extérieure, je peux apprendre à écouter ce qui en moi cherche à s’accomplir. Plutôt que de croire que la sagesse réside dans un choix froidement réfléchi, peut-être dois-je accepter qu’elle consiste à reconnaître les forces qui me traversent, à les accueillir, à en faire une harmonie plutôt qu’un combat 4️⃣.

Cela ne signifie pas que je doive me laisser emporter sans discernement par tout ce qui me traverse. Cependant au lieu de juger mes expériences, en amont, peut-être puis-je apprendre à les suivre, à voir où elles me mènent. C’est par l’expérience et non par la simple déduction, décision intellectuelle que je pourrai discerner ce qui me construit de ce qui me disperse. Ainsi, la question n’est pas de savoir si une expérience est « bonne » ou « mauvaise » avant de l’éprouver, c’est d’apprendre, d’accepter, en le vivant, si elle m’ouvre ou me ferme à la plénitude de mon Être.

Dès lors, quelque chose de nouveau se présente. Ce n’est celui du jugement abstrait, c’est celui du consentement à ce qui, en moi, cherche à s’accomplir. Il ne s’agit pas d’un abandon aveugle, c’est une écoute plus fine, plus adaptée, plus acceptée de cette réalité qui me précède et me façonne. Si je veux véritablement accepter ce qui est « bon » pour moi, ce n’est pas en l’analysant à distance, c’est en m’abandonnant à ce mouvement qui me porte vers Lui. Ainsi, le « bien » n’est pas une idée figée que je devrais découvrir avant d’agir, c’est une révélation qui surgit dans l’acte même de la conquête 5️⃣.

J’accepte alors que je ne choisis pas mon chemin en fonction d’un savoir préexistant. C’est le chemin lui-même qui me révèle pourquoi je l’ai choisi. Ce n’est pas en me demandant si une chose est « bonne » que je décide de la poursuivre, c’est en la poursuivant que j’en découvre la véritable nature. Peut-être est-ce là la véritable essence de la vie. Un mouvement qui se justifie dans l’expérience, un élan dont la Vérité se révèle en chemin et non avant le départ.

(Mon Essence Spirituelle)
(Michaël « Shichea » RENARD (20250208-1))
(Illustration : Flux (Pro) suivant mes directives)
(Musique lors de l’écriture : Jacob Roberge – 2025 – The Passing)

1️⃣ :  « Je le répète, vous n’avez jamais envoyé d’épreuve sans sa propre solution, et la solution impliquait d’Être, de devenir quelqu’un d’autre. Voilà » ;

2️⃣ :  Voir les textes « OSONS ! », « L’acceptation », « Le Silence est d’Or … et moi dedans » ;

3️⃣ :  L’Éthique (en latin : Ethica, en forme longue : Ethica Ordine Geometrico Demonstrata ou Ethica More Geometrico Demonstrata, littéralement « Éthique démontrée suivant l’ordre des géomètres ») est une œuvre philosophique de Spinoza rédigée en latin entre 1661 et 1675, publiée à sa mort en 1677 et interdite l’année suivante. Il s’agit sans doute de son ouvrage le plus connu et le plus important : son influence, entre autres sur les penseurs français, va grandissant depuis les années 1930 (merci Wikipedia) ;

4️⃣ :  voir le texte « Merci Donald ! » ;

5️⃣ :  voir le texte « C’est ma Prière ».

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