De ma souffrance
J’ai déjà écrit ce mot « souffrance » dans différents textes. Je l’ai cité 150 fois. Le mot « souffrance » vient du latin « sufferantia » signifiant, dans un premier sens, « endurance », « résignation », « attente patiente » et, dans un deuxième sens, « douleur », « peine », « supplice », « passion » et « larmes ».
Dans le texte « Comment est ma peine ? », j’avais déjà parlé de la peine, de la tristesse. Ici, je vais parler de ma souffrance tant physique qu’émotionnelle. Cette souffrance physique qui se traduit non seulement par des douleurs de l’âge mais également par des conflits émotionnels non résolus. J’en connais quelques-uns de ces conflits qui sont survenus suite à un choc émotionnel. J’ai parlé de ces chocs émotionnels dans le texte « Non, rien de rien, non, je ne regrette rien » et récemment dans « Acouphène ».
Me vient une question : « Y a-t-il une distinction essentielle entre souffrance et douleur ? ». J’ai pourtant indiqué que la souffrance physique se traduisait par des douleurs. Je peux jouer sur les mots qu’en écrivant « douleur », j’entends « doux leurre ». J’avais déjà utilisé ce mimétisme oral dans « Le Doux Leurre de l’Éveil » et dans « Le Doux Leurre de l’Instant-Présent ». Je suis tenté d’écrire que la douleur est physique et que la souffrance est « morale » voire « mentale ». Dans « Acouphène », j’avais parlé de mon expérience avec la hache sur mon pied. J’ai ressenti une douleur physique. Si je veux enfoncer un clou avec un marteau et que je rate « mon coup » et que le marteau heurte un doigt au lieu de la tête du clou, je ressens aussi une douleur physique. Si un être qui m’est cher meurt (j’en ai déjà parlé dans « Reste un peu »), je ressens une grande souffrance. Cette souffrance qui peut être une compagne au « long cours ».
La réponse à la question posée précédemment peut être : « Je peux souffrir sans avoir mal. Je peux être mal sans avoir mal ». Est-ce aussi simpliste que ceci ? J’ai déjà souvent parlé de la dualité de l’existence. Dans cette dualité, il y a une séparation entre le corps et l’esprit (ou l’ego). Le corps souffre et l’esprit souffre. Si j’ai un cancer et que je sais que je vais mourir, il y a la souffrance physique que les anti-douleurs n’arrivent plus à calmer. En même temps, cette souffrance physique s’accompagne (j’avais dit que c’était une compagne) de la souffrance « mentale » de voir s’approcher la mort avec la séparation physique de tous les êtres qui me sont chers.
Cette dualité apporte une réponse elle-même duelle. Si je souffre physiquement, je vais avoir recours à la médecine qu’elle soit traditionnelle ou énergétique (je simplifie). Si je souffre psychiquement, je vais avoir recours à la psychologie, à la psychiatrie pour mettre des mots sur mes maux. Cependant, il y a bien d’autres dimensions que cette binarité. Ce n’est pas aussi manichéen que ceci. Il y a des aspects familiaux, sociétaux et … spirituels.
Et c’est ici que je souhaitais en arriver à cette notion de souffrance spirituelle. D’où pourrait provenir cette souffrance spirituelle ? Je l’avais déjà esquissé dans le texte « The Syn-« . Je vais, dans ce texte, un pas plus loin.
Il y a eu et il y a encore des personnes qui sont, comment dire, en émergence spirituelle. J’ai écrit « émergence », j’aurais pu écrire aussi bien « immergence ». Ce serait comme un océan calme dont la ligne d’horizon cacherait bien des « choses ». À la surface de l’eau, je pourrais écrire de l’air, il y a de l’eau en-dessous et de l’air au-dessus. Si je suis dans l’eau et que j’émerge à l’air, je change d’état. Si je suis dans l’air et que j’immerge dans l’eau, je change d’état. Je retrouve à nouveau cette dualité. Dans le texte « Poisson volant (Ichthus) », j’avais abordé cette dualité sous cet angle sans utiliser les mots « émergence » et « immergence ». Que ce soit l’un ou l’autre, en fait, peu importe, le principal, c’est le passage d’un état à un autre.
Beaucoup de personnes se sont trouvées et se trouvent en émergence/immergence spirituelle. Comme la médecine dite « traditionnelle » n’a pas encore certaines clés pour accepter ce changement d’état, les dites personnes se retrouvent, parfois, en psychiatrie. Récemment dans un commentaire sur « The Syn-« , une Âme Sœur a parlé du psychiatre Stanislov Grof.
Dans son livre « Les nouvelles dimensions de la Conscience », il parle des expériences transpersonnelles telles que : « expérience d’unité duale, identification à d’autres personnes, identification et conscience de groupe, identification à des animaux, identification à des végétaux et à des processus botaniques, conscience planétaire, expériences embryonnaires et fœtales, expériences ancestrales, expériences d’incarnations passés, expériences spirites et médiumniques, phénomènes énergétiques du corps subtil, expériences de séquences mythologiques, expériences d’archétypes universels, psychokinèse » (merci Wikipedia).
Dans le texte « Chanjon », j’avais écrit sur les EMI (Expériences de Mort Imminente) dans lesquelles des personnes revenaient avec des capacités que la science ne sait pas expliquer. Certaines personnes se retrouvent même en psychiatrie suite au fait que ce qu’elles disent ou expriment, dépasse l’entendement scientifique. D’autres ont des épisodes que l’on nomme « psychotiques ». Durant ces épisodes, certaines vivent une connexion que je pourrais nommer « phénomène spirituel » (ceci en référence au « Phénomène Humain » de Pierre-Teilhard de Chardin).
Le psychiatre Stanislov Grof a mis au point une « thérapie holotropique ». Le mot « holotropique » a été créé par ce psychiatre. L’origine vient du grec « hólos » signifiant « entier » et de « tropikós » signifiant « relatif à ou qui appartient à un tour ou un changement ». Dans cette thérapie, il y a une combinaison de la respiration accélérée, de la musique et d’un travail sur le corps. Cette combinaison vise à éliminer les blocages énergétiques. Il y a, bien sûr, d’autres thérapies permettant le déblocage énergétique, cependant, elles sont rares à associer la respiration, la musique et le travail corporel. Comme toute thérapie, il est nécessaire d’avoir un encadrement adapté. Jouer à l’apprenti-sorcier a des conséquences (voir le texte « Ex Opere Operato »).
Est-ce que tout ceci m’éloigne de ma souffrance ? Non. J’ai de la peine pour mon fils qui entend des voix et qui voit des monstres. J’avais écrit un conte intitulé « Le Combat d’un Fils » pour exprimer d’une autre manière, cette souffrance mentale au quotidien. Ainsi, est-il entre deux États d’Êtres ? Est-il comme le poisson volant entre deux états ? Ces états seraient pour lui, une vision de la « réalité » du plan terrestre tel que je la « connais » et une autre vision, d’un autre monde qui serait soit « non visible » sur le plan terrestre, soit « non visible » car hors de notre plan. Même s’il s’exprime sur ses circonstances de Vie, je ne sais pas répondre ce qui se passe en lui. Pour lui, tout est « réel », il n’y a pas, comment dire, une virtualisation de ce qui se passe à travers ses sens.
Mon épouse et moi l’accompagnons, au mieux, dans les circonstances de sa Vie. Ainsi, pour nous aussi, il y a une souffrance « mentale » et une douleur physique. Je vais même plus loin avec l’expérience de ma crise de gouttes, mon problème actuel au genou droit. Suis-je arrivé à un moment de ma Vie où je ne sais plus avancer, où quelque part je me retrouve bloquer dans l’aide que je peux lui apporter aussi bien à lui, qu’à d’autres personnes ? En d’autres termes, est-il nécessaire que des personnes souffrent pour que d’autres puissent vivre leurs expériences de Vie ? Est-ce un sacrifice ou simplement le contrat d’Âme qui est respecté ?
Pour ma part, la notion de « sacrifice », c’est ce que l’ego veut faire croire. Le contrat d’Âme parle de lui-même. Pourtant dans « sacrifice », j’entends « sacré fils ». Je sais que le « raccourci » est facile et, en même temps, « sacrifice » vient du latin « sacrificium », signifiant, je le donne en mille, « fait de rendre sacré ». Est-ce que je me sacrifie en accompagnant quelqu’un de ma famille et de mon entourage ? Quelque part, je ne prends plus du temps pour moi puisque je l’offre à l’autre. Non pas que j’attende quelque chose en retour, simplement que prendre du temps pour soi est une notion « simple » quand les circonstances de la Vie sont « propices » à le faire.
Ainsi, prendre du temps pour soi, dans le contexte que je vis, se « limite » à quelques petites sorties car « on ne sait jamais ». Quand quelqu’un dit que la Vie est difficile, qu’il est lui impossible de voir la fin de sa souffrance, qu’au final, sa transition permettra aux autres de vivre une « meilleure » Vie, que faire ? Laisser faire ou se dire que je peux « influer » sur le contrat d’Âme ? J’ai pris le parti d’influer sur le contrat d’Âme, d’amener un changement dans les circonstances de Vie de chacun.e. Je ne sais pas le « pouvoir » que je peux avoir mais je sais que j’en ai UN. J’avais déjà indiqué dans le texte « 5% » que le libre-arbitre est limité. Cependant, même avec cette limite, je peux influer, non seulement mon chemin de Vie mais également le chemin de Vie d’autrui. Peu importe, que l’influence soit connotée « petite » ou « grande » tant que je sais que j’ai un « pouvoir d’influence ».
Beaucoup de personnes, sans jugement, se résignent aux circonstances de la Vie. J’ai été souvent adepte de l’expression « Advienne que pourra ». C’est une autre manière de dire que j’accepte les événements futurs, quel qu’en soit le résultat, sans me préoccuper outre mesure des conséquences sur moi ou sur d’autres. Cela signifie que je suis prêt à accepter ce qui arrivera, que ce soit « favorable » ou non, et que je suis prêt à faire face aux circonstances sans anticiper ni m’inquiéter de manière excessive. Cette expression exprime une attitude de résignation ou d’acceptation stoïque face à l’incertitude de l’a-venir (à propos de « stoïque », voir le texte « Marc Aurèle, Sénèque, Epictète, et moi, émois »).
En même temps, avec cette devise que j’avais fait mienne, je me dis que je reste dans une attitude passive, un « rôle » passif (voir le texte « Ex Opere Operato »). C’est un peu comme dans un jeu vidéo où je suis la trame de l’histoire sans savoir s’il y a d’autres chemins ou non. Ainsi, je choisis de passer dans un « rôle » actif. En fait, à ce stade de l’écriture de ce texte, je me rends compte que je suis déjà dans ce « rôle » actif en partageant mes expériences de Vie. Dans ce « rôle » actif, je ne suis plus la trame de l’histoire, je crée moi-même de nouvelles trames (voir le texte « Les plis de l’Existence »).
Je ne sais pas si ma souffrance sera entendue, si ma souffrance me sera enlevée, si je m’enlèverais ma souffrance. Par contre, ce que je sais, c’est que je prie, j’invoque, j’enjoints tous les jours pour que mon fils puisse avoir une « meilleure » vie. En tout cas, une vie « idéale » lui permettant d’avoir moins de peine et plus de Joie. Et, en même temps, je ne m’oublie pas.
J’ai souvent estimé, par le passé, qu’il valait mieux souffrir dans sa chair, dans son corps que dans sa « tête ». Ceci n’est qu’une question de perspective. Quand j’exprime « dans sa tête », c’est pour signifier les « tempêtes mentales » qui sont présentes au quotidien.
Pour moi, la souffrance mentale est une énigme. Elle m’échappe car elle m’est intangible, immatérielle, impalpable, intouchable. Les pensées qui surviennent son des éclairs errants qui zèbrent, lézardent le ciel intérieur et révèlent des tourbillons d’émotions tourmentées. C’est un peu comme une symphonie discordante que seuls ceux et celles qui l’entendent peuvent, non pas comprendre, uniquement la subir. Il n’y a pas d’interrupteur, de bouton « off » pour éteindre cette cacophonie. Oh bien sûr, il y a des médicaments qui assomment, qui assourdissent ce bruit de fond, et, en même temps, ils ont aussi l’effet pervers de tout assourdir, d’assommer les personnes qui en consomment.
Je sais que chaque esprit est un univers en soi. Cet univers qui est empli de galaxies d’émotions en perpétuelle expansion. Et puis, pour certain.e.s, un jour, il y a comme une sorte de « big bang » qui fait cette expansion entre en collision et qu’ainsi un certain chaos se crée dans la « tête ». La douleur provoquée ne génère pas seulement un cri, elle génère une mélodie désaccordée résonnant dans les coins les plus sombres de la conscience. C’est un peu comme des ombres dansant en silence, une traversée sur un fil ténu entre le chaos et la clarté, entre l’ombre et la Lumière. Les pensées deviennent des rivières tumultueuses (j’entends « tueuse ») emportant les esprits errants vers des abysses inexplorés.
J’ai bien entendu « tueuse » car aussi, je ne me voile pas la face, quand j’ai écrit le terme « transition ». C’était une autre façon d’exprimer le fait de quitter ce monde duel. Duel comme ce combat qu’est, pour certain.e.s, la Vie tout simplement. Ce départ qui est, paraît-il, déjà inscrit dans nos gênes, dans les télomères des chromosomes. Pourtant, certain.e.s décident, au vu des circonstances de leur Vie, de ne pas « respecter » la date de cette transition et de transiter plus tôt. C’est, dit d’une autre façon, « d’appliquer » les « 5% » du libre-arbitre.
Pourtant, j’insiste que tout n’est pas écrit d’avance. Oui, bien sûr, il y a les grandes lignes, il y a les lignes temporelles. Pour mon fils et pour d’autres, bien d’autres, au cœur de sa tempête mentale, persiste une lueur d’espoir aussi faible soit-elle. Si une étincelle peut embrasser une forêt entière, pourquoi une lueur ne permettrait-elle pas d’amener une pleine Lumière. Car, dans chaque nuit, il y a la promesse d’une aube nouvelle. Je sais que certain.e.s perçoivent la souffrance mentale comme une condamnation à perpétuité. Je garde, en moi, cette étincelle qui m’invite à démêler les fils emmêlés de la pensée.
Ainsi, la compassion, l’empathie, telle une pluie bienfaisante peut arroser les jardins desséchés. L’écoute attentive, l’acceptation sans jugement deviennent un baume pour les blessures invisibles. Car, effectivement, il n’est pas nécessaire de comprendre chaque nuance de la douleur mentale, mais simplement d’accepter la « réalité » que chaque Être HUmain porte sa propre charge, son propre fardeau souvent invisible aux regards extérieurs.
La souffrance mentale, même si elle paraît être une faiblesse, est le terrain où la résilience prend racine. Chaque bataille intérieure est une étoile qui s’embrase, illuminant l’obscurité. Et peut-être, dans la contemplation de cette toile complexe, je peux découvrir une nouvelle sagesse, une appréciation profonde de la fragilité humaine et de la force qui peut émerger des cendres de la souffrance.
Dans cette vaste étendue de la condition humaine, la souffrance mentale devient une étoile filante, illuminant le ciel de l’expérience humaine (merci Pierre-Teilhard de Chardin), rappelant à chacun.e que, même dans l’obscurité, la lumière peut percer.
Si j’ai pris l’exemple de mon fils, c’est que je sais qu’il y a de la lumière dans ses yeux. Il n’en a pas toujours conscience. Je sais qu’elle est ici. Je me rappelle d’une phrase d’une participante dans un groupe de paroles, basé sur les maladies mentales, quand elle parlait de la relation avec son fils. Quand elle parvenait à avoir un échange avec lui, dans les moments où la tempête mentale se calmait, elle disait : « C’est une petite victoire ». J’ai retenu cette petite phrase comme l’espoir que chaque victoire en amène une autre puis une autre.
En écrivant ce texte, ma souffrance n’a pas disparu, elle a simplement été atténuée. Même si elle n’a pas disparu, je sais qu’elle ne m’affecte plus. Elle est présente sans que j’en souffre. C’est paradoxal d’écrire ceci et pourtant, c’est comme s’il y avait une présence qui n’est plus « un ennemi à combattre » et qui est devenue « une amie à accompagner ».
(Michaël « Shichea » RENARD (20231125-1 & 20231127-1))
(Art Numérique : Bing Creator suivant mes directives)
(Musique lors de l’écriture : Eloy Fritsch – 1996 – Dreams & Eloy Fritsch – 1997 – Behind the Walls of Imagination)

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